Le contenu des épreuves et ses conséquences pour l’apprentissage :
Les élèves de terminale en filières générale ou technologiques ont passé du 11 au 13 mai leurs deux épreuves de spécialité (EDS), chacune de coefficient 16 (sur un total de 100). En dehors de l’épreuve de philosophie et de l’épreuve anticipée de français en première, qui auront lieu les 15 et 16 juin respectivement, ce sont désormais leurs seules épreuves écrites.
En filière générale, du fait du grand nombre de combinaisons possibles de spécialités, et pour faire passer la majorité des épreuves en deux jours, il y a désormais un sujet « Jour 1 » et un sujet « Jour 2 » dans la quasi totalité des disciplines. Deux sujets de nature et de difficulté parfois fort différentes, certains ayant même été en ligne dans les banques de sujets car prévus pour la session 2021 et, par conséquent, parfois utilisés comme sujets d’entraînement au cours de l’année scolaire.
Avant la réforme Blanquer, les épreuves du baccalauréat portaient sur le programme complet de terminale. Désormais, et indépendamment de la crise sanitaire, les EDS ne portent plus que sur une partie de ce programme. Celle-ci prend une place disproportionnée dans les stratégies d’apprentissage de quelques élèves. Mais, il faut bien aborder tous les thèmes prévus afin de ne pas pénaliser les élèves dans leurs études supérieures. Or, de nombreux collègues peuvent en témoigner, il a été difficile de travailler sur les notions non évaluées avant les écrits et il a été encore plus difficile de le faire après les écrits.
Le calendrier des épreuves et ses conséquences pour les élèves :
Initialement prévues mi-mars afin d’être intégrées au dossier Parcoursup pour l’examen de vœux d’orientation post-bac, les EDS ont été repoussées en raison du COVID et de la gestion chaotique de la situation sanitaire par le Ministère. Ces dysfonctionnements et les entêtements de M. Blanquer ont provoqué incompréhension, épuisement et désengagement pour de nombreux élèves. Alors que le personnel enseignant, conscient des difficultés rencontrées par les élèves, demandait très majoritairement à ce que ces épreuves se tiennent mi-juin, le ministre Blanquer a choisi le mois de mai.
Ce choix a engendré une forte désorganisation au sein des établissements scolaires :
– pendant la semaine du 9 au 13 mai : les cours de première et de seconde ont souvent été supprimés afin de permettre aux terminales de réviser puis de composer ;
– après les épreuves : le personnel enseignant convoqué aux réunions d’entente, puis pris par les corrections, n’est pas devant ses élèves.
Contrairement à ce que le discours officiel laisse entendre depuis des années, on est très loin de la reconquête du mois de juin, puisque désormais même le mois de mai est amputé de très nombreuses heures voire journées de cours.
La correction et ses conséquences pour le personnel :
Il était initialement prévu que les personnels enseignants missionnés pour corriger les EDS le fassent dans le même temps que leurs activités et missions pédagogiques ordinaires. Finalement, les organisation syndicales ont obtenu quatre demi-journées consacrées à la correction. Elles devaient être utilisées en accord avec le chef d’établissement. Alors que des collègues ont pu choisir sans contrainte leurs quatre demi-journées, pour d’autres elles ont été imposées et uniformes, quelque soit leur emploi du temps. D’autres, encore, ont renoncé à ces demi-journées pour maintenir les apprentissages et s’épuisent. C’est le cas notamment des personnels enseignant en Lettres et en Philosophie qui doivent encore préparer les élèves aux épreuves de juin.
La correction numérique des copies est désormais généralisée via la plateforme Santorin. En dehors de la surcharge de travail pour les directions et les secrétariats d’examen, de l’inconfort généré par le travail sur écran, du manque de souplesse de la plateforme qui ne permet pas de confronter les copies pour une correction plus équitable, il a fallu faire face à de nombreux bugs : copies numérisées dans le désordre ou incomplètes, copies mal attribuées, copies non réparties une semaine après la réunion d’entente – par conséquent temps de correction considérablement réduit pour les personnes concernées – et même impossibilité d’accès à la plateforme pendant plusieurs heures. Il est donc légitime de s’interroger sur la pertinence de ce choix peu efficace mais terriblement énergivore, à l’heure où les conséquences du changement climatique préoccupent fortement près de la moitié de la population.
Mais nous oublions certainement que le travail en ligne permet la surveillance généralisée du personnel correcteur…
Après cette version 2022 du bac Blanquer, bac qui s’inscrit dans une réforme du lycée anxiogène et confuse pour les élèves et le personnel, il est plus que légitime de demander le retour à des épreuves finales, portant sur tout le programme de la classe de terminale, se déroulant sur toute une semaine afin que les élèves aient tous et toutes à composer sur le même sujet, et le retour à une correction de copies en version papier.
Pour une véritable égalité entre les candidats, le retour à des épreuves nationales est nécessaire : l’abolition du contrôle continu est indispensable ainsi que celle de Parcoursup.
Par Sandrine JACOBY, membre du bureau du SNFOLC 67, professeure en lycée et relais établissements.