Violence à l’École : le « sursaut d’autorité »de G. Attal, ou la satisfaction des revendications ?

Après l’assassinat de Dominique Bernard, Gabriel Attal, alors ministre de l’Education nationale avait promis un engagement
de l’Etat aux côtés des enseignants et s’était déclaré favorable à une mise en œuvre automatique de la protection fonctionnelle. Désormais Premier ministre, le renforcement des mesures de protection des personnels ont disparu de l’ordre du jour. Elles ont été remplacées par une communication à grands renforts de déclarations sur un « sursaut d’autorité » et de formules choc du type « Tu casses, tu répares. Tu salis, tu nettoies. Tu défies l’autorité, on t’apprend à la respecter. »
Le 18 avril, à Viry-Châtillon, le Premier ministre a déclaré vouloir « une école du civisme, de la règle commune, du respect
de la règle, des droits et devoirs et de la responsabilisation de tous
». Il a annoncé une série de mesures visant les mineurs de 13 à 16 ans qui ont commis un vol ou une petite dégradation pour la première fois. Sanction sur leur brevet, leur CAP ou
leur baccalauréat, mention apposée sur leur dossier Parcoursup. Il a annoncé vouloir lutter contre l’oisiveté par tous les moyens en accueillant les élèves de 8h à 18h.

Une mesure d’« intérêt éducatif » a également été définie par la circulaire du 30 avril du garde des sceaux Eric Dupond-
Moretti. Présentée comme « un premier niveau de réponse pénale », sa mise en œuvre suppose le concours des policiers,
d’éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), des collectivités territoriales et de l’Education nationale. Un
volet, dit de réparation, consiste en une activité de 20 heures maximum, en lien avec l’infraction commise pour réfléchir sur
ses conséquences. Un deuxième volet de 4 heures prévoit une réflexion sur le vivre-ensemble. Et un troisième volet éducatif
doit être planifié avec l’établissement scolaire du mineur. La circulaire prévoit d’impliquer les représentants légaux de
l’adolescent à toutes les étapes de la mesure en lien avec la PJJ.

DERRIÈRE LES ANNONCES, IL Y A LA RÉALITÉ.
Ces mesures interrogent sur l’intérêt de sanctionner les élèves au moyen du livret scolaire, ce qui installerait une confusion
entre le pédagogique et l’éducatif, entre l’évaluation du travail de l’élève et de son comportement. Non seulement cela remet une nouvelle fois en cause les prérogatives des jurys d’examens, mais expose encore un peu plus les personnels aux pressions des élèves et des parents sans parler des recours juridiques qui ne sont pas à exclure. Pour ce qui concerne la circulaire du 30 avril, les mesures apportent une réponse pénale à un problème éducatif en contradiction avec les ordonnances de 1945 sur la protection de la jeunesse.
Nul besoin d’être un expert pour savoir que les mesures sont inapplicables faute de moyens humains, dont manquent
cruellement l’Education nationale, comme la police et la PJJ, conséquence des réformes successives et des coupes budgétaires. La circulaire du 30 avril suppose la coordination de services régaliens qui ont littéralement été dépecés. Annoncer des mesures répressives impossibles à mettre en œuvre risque d’aboutir à exposer encore un peu plus les personnels qui sont en première ligne. Les organisations syndicales FSU, UNSA Education, FNEC-FP-FO,
SGEN-CFDT, CGT Educ’action et SUD Education ont décidé de boycotter la « grande concertation sur l’autorité à l’École »
organisée par la ministre Belloubet car ces mesures « ne vont en rien résoudre les questions de climat scolaire à l’intérieur
des écoles et des établissements
», « l’École, ses élèves et ses personnels sont méprisés et réduits à de simples pions dans un
exercice politicien. »
[...]

COMMENCER PAR RÉTABLIR LE RESPECT DES RÈGLES ET DE LA LOI
Au lieu de produire de nouvelles circulaires, le Premier ministre serait bien inspiré de commencer par faire en sorte que la
loi puisse s’appliquer au sein des établissements. Il faudrait commencer par appliquer systématiquement la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 (article L. 134-1 et suivants du code général de la fonction publique) qui prévoit la mise en œuvre de la protection fonctionnelle du recteur pour les professeurs, les AESH, les AED… en cas d’agression dans le cadre de leurs fonctions. Cette loi est protectrice pour les personnels comme pour les élèves car elle rétablit un cadre réglementaire qui aide
ces derniers à se construire.

COMMENCER PAR RÉTABLIR LES POSTES SUPPRIMÉS ET ABROGER LE CHOC DES SAVOIRS
Si comme l’affirme le Premier ministre, « la bataille de l’autorité se gagne dans les classes et dans les couloirs des
établissements
», alors il faudrait commencer par faire en sorte que le règlement intérieur des établissements soit respecté et que les personnels en aient les moyens humains en CPE et assistants d’éducation. Il faudrait que les effectifs par classes diminuent. Pour cela il faudrait commencer par rétablir les postes supprimés par deux décennies de réformes et de rigueur budgétaire. Et pour la rentrée 2024 il faut que les ministres Attal et Belloubet renoncent immédiatement à leur réforme dite « choc des savoirs » qui va exactement à l’encontre de toutes ces revendications en désorganisant encore plus les établissements scolaires.

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